La pratique : La méditation assise et marchée

1. La méditation assise – le zazen

On rappel que le mot « méditation » s’écrit et s’appelle dhyana en sanscrit, tchan en chinois, son en coréen et zen en japonais. La méditation assise s’actualise par la pratique de zazen, lequel terme japonais est composé de deux caractères qui expriment l’action de s’asseoir « za » en méditation « zen ».

Pour le Zen Soto, la pratique de la méditation assise et la réalisation de l’éveil sont indissociables. La pratique de la méditation assise, le « zazen », est simplement l’action de seulement s’asseoir ou « shikantaza » (jap.). Cette pratique méditative consiste à se dépouiller de son propre corps et de son propre esprit (shin jin datsu raku en jap.), et ce d’instant en instant, de moment en moment, sans saisir, rejeter ou poursuivre toutes formes de sensations, d’émotions, de perceptions ou de pensées.

La pratique de zazen est aussi parfois appelée la « pratique-réalisation » de la voie, car la pratique de la méditation assise est inséparable de la réalisation, voire de l’Éveil, soit celle de s’éveiller de ses propres illusions. La réalisation comme présence, c’est l’expérience d’être juste ici et maintenant dans l’assise où il n’y a rien à rajouter et à retrancher de l’écoute silencieuse. Tout est complet, les dix mille mondes qui vont et viennent dans notre esprit sont l’Univers entier, sans début ni commencement. Fondamentalement, du tréfonds de la non-pensée, au-delà de la pensée et de la non-pensée, voire grâce à la conscience « Hishiryo » (ni pensée ni non pensée) qui émerge de la pratique de zazen , notre nature originelle ou la véritable nature de l’esprit, n’est que sagesse et pure présence, compassion et bienveillance, plénitude et joie profonde. La pratique de zazen est une voie directe et sans détour qui nous plonge, si notre coeur est sincère et déterminé, au sein même de la Réalité, de l’Univers, de l’Homme vrai, de l’Humain véritable ou le « tchen jen » en chinois.

La pratique de la méditation assise demande une attention et une présence particulières sur la posture, la respiration et l’attitude du pratiquant. La posture du corps n’est ni tendue ni relâchée. Le pratiquant est bien assis sur un coussin (zafu), un banc ou une chaise. Les jambes sont placées en position du lotus, demi-lotus, tailleur ou dans une assise plus conventionnelle comme sur un banc ou une chaise. Le bassin est légèrement basculé vers l’avant et plus haut que les genoux. La colonne vertébrale est droite, dans une tension juste, ni tendue, ni relâchée. Le menton est légèrement rentré, la nuque est bien dégagée. Le regard est simplement déposé dans un angle d’environ 45 degrés vers le sol et un mètre devant soi, sans fixer de point précis. Les yeux sont mi-clos. Les mains sont placées en position du mudra du lotus, la main droite supporte la main gauche, les pouces se touchent et ne forment ni montagne ni vallée.

La respiration est laissée à elle-même, sans volition, sans contrôle ni effort. Avec le temps, par elle-même, elle devient lente et profonde. Notre attention est portée sur l’expiration.

L’attitude de l’esprit n’est qu’ouverture inconditionnelle, détermination, authenticité et sincérité, sans attente ni intention, sans but ni profit personnel (mushotoku). Les sensations, les émotions, les perceptions et les pensées sont laissées à elles-mêmes. On ne les saisit pas, on ne les rejette pas, on ne les poursuit pas. On se détend et s’abandonne à l’expérience du moment. Les diverses attitudes et qualités de l’esprit (sanshin) qui se déploient et s’actualisent par la pratique sont : (1) l’esprit vaste et spacieux (daishin), lequel voit et embrasse toutes choses de manière inconditionnelle, sans jugement et considération personnelle, au-delà de toute forme de dualité; (2) l’esprit joyeux (kishin), lequel témoigne d’un sentiment d’unité, sans séparation avec le monde intérieur et extérieur, amenant un sentiment de plénitude, de sérénité, d’harmonie et de joie profonde; et (3) l’esprit bienveillant (roshin), lequel est libéré de toutes affections personnelles ou animé d’une affection inconditionnelle pour tous les êtres sensibles et soi-même. Les différentes attitudes de cet esprit vertueux (sanshin) se déploient par la pratique de zazen et nous permettent de réaliser l’interdépendance, l’impermanence et le non-soi de toutes choses à partir du cœur ou de la tendresse des Bouddhas.

2. La méditation marchée ou la marche centrée – le Kin hin

La méditation marchée est appelée Kin hin ou Kyôgyô en japonais et jingxing en chinois. Littéralement, elle signifie « aller droit ». Le Kin hin est une marche lente, rythmée par la respiration. Elle se pratique en général entre deux périodes de méditation assise ou zazen. Elle est aussi à elle seule une pratique méditative. Elle permet d’activer la circulation dans les jambes entre les séances de zazen, et ce tout en poursuivant notre pratique méditative. Cette marche respecte les points essentiels de la posture de l’assise et l’attitude de l’esprit qui l’accompagne. La position des mains, la posture du corps, l’attitude de l’esprit, le rythme de la marche et de la respiration sont en harmonie.

Pour la position des mains, le pouce gauche est replié à l’intérieur de la main gauche. On ferme la main et place la racine du pouce contre le plexus solaire. On recouvre la main gauche avec la main droite pour former un poing. Le poing et les coudes forment une ligne bien droite à l’horizontale, parallèles au sol.

Pour la posture du corps, le menton est légèrement rentré, la nuque est bien dégagée. Le regard est déposé dans un angle de 45 degrés vers le sol environ 1 à 2 mètres devant soi, sans fixer de point précis. Les épaules sont dans une position naturelle et détendue, le dos est droit, les avant-bras à l’horizontale. Le corps n’est, ni trop tendu, ni trop relâché, ni en avant, ni en arrière, ni à gauche, ni à droite, en équilibre entre ciel et terre.

La marche se fait au rythme de la respiration, sans effort, en alternant entre l’inspiration et l’expiration. Sur l’inspiration, on avance d’un demi-pas. Sur l’expiration, on transfère le poids de la jambe arrière dans la jambe avant. À la fin de l’expiration, on fait une légère pause et on laisse l’inspiration venir d’elle-même, tout en avançant d’un demi-pas. On répète ce cycle pendant toute la durée de la pratique de Kin hin, soit de 10 à 15 minutes.

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